La question pourrait être formulée autrement : « Qu’est-on en droit d’attendre de l’Ecole ? »
L’Ecole est de longue date , que ce soit par nos dirigeants politiques de droite ou de gauche, considérée comme étant l’une (pour ne pas écrire « la ») des priorités nationales : notre jeunesse doit être formée , le mieux possible , pour affronter le monde de demain. Il n’y a pas de distinction entre riches et pauvres , mieux , l’Ecole doit servir d’ascenseur social .
« Ascenseur social » : l’école ne remplit plus aujourd’hui en général cette fonction , autrement dit l’Ecole faillit à l’une de ses premières missions.
Pourquoi ? Je n’ai pas de réponse toute faite à cette question , mais je voudrais essayer d’y répondre en fonction de ce que je vois , je sais et vis à l’Education Nationale comme professeur.
On reproche souvent aux syndicats enseignants de faire obstacle à toute réforme lancée par tel ou tel ministre . Curieusement , chaque ministre de l’Education Nationale entend laisser trace de son passage au ministère , fût-il même court, en lançant une réforme . Proche de nous , il s’agit actuellement de la réforme des lycées engagée par Xavier Darcos (qui semble avoir totalement disparu du paysage politique actuel) mais mise en place par Luc Chatel.
Que l’on ait tendance à mettre tous les syndicats dans le « même sac », cela peut certainement se comprendre quand on est complètement étranger , fût-on parent d’élève, n’a rien de surprenant . C’est notamment ce que fait SOS Education qui a manifestement pignon sur rue. A part cet amalgame , à SOS Education , on a bien conscience de la situation très difficile dans laquelle se trouve l’Education Nationale actuellement .
Non ,tous les syndicats n’ont pas à être logés à la même enseigne. Le SNALC (Syndical National des Lycées Collèges) me semble être le plus réaliste et le plus objectif. Contrairement à ce que proclament les adversaires ou les incompétents , le SNALC n’est pas un syndicat de « Droite » : il est bien apolitique , c’est un syndicat humaniste et républicain .
Le mieux connu des syndicats enseignants est le SNES-FSU . On peut regretter sa teinte politique très à gauche et le fait qu’il ramène très souvent les problèmes de l’Education Nationale à une question de moyens.
Le fleuron , au sens négatif du terme, est le SGEN-CFDT. Voilà plus de 30 ans que ce syndicat contribue au sabordage de l’Education Nationale .Très écouté à l’époque des gouvernements de Gauche , tout à fait dans la ligne de l’équipe Ségolène ROYAL qui souhaitait que les enseignants fassent leurs trente cinq heures hebdomadaires dans les établissements scolaires ( dans quels locaux ?) , ce syndicat n’est-il pas encore très écouté aujourd’hui par nos dirigeants actuels de droite, quand on sait qu’ils ont pour objectif , à plus ou moins long terme, de redéfinir le temps de service des enseignants ? Voilà un syndicat qui n’a pas hésité à voter la réforme du lycée dont on commence à se rendre compte sur le terrain des aspects dévastateurs.
On peut donc comprendre les connivences entre certains syndicats et le pouvoir en place. D’un côté on rêve de « pédagogisme » , de réformes , et de l’autre , on pense « économies budgétaires ».
En arrière plan , n’y a t-il pas ces pseudo-scientifiques de la pédagogie , cette nouvelle discipline baptisée « Sciences de l’Education » ? La pédagogie peut-elle être considérée comme une discipline scientifique ? Il semblerait que certains le pensent . Disons le franchement , feu les IUFM (Instituts de formation des maîtres) s’en sont largement inspirés pour formater les nouveaux professeurs.
Sophie COIGNARD , journaliste du POINT a mené son enquête (Le pacte immoral chez Albin Michel ) et pour ma part , je me réjouis de ses déductions : enfin une analyse objective de ce qu’est devenue l’Education Nationale . Elle n’hésite pas à dénoncer ce clergé adepte du pédagogisme …………. Ecoutons la :
Nous pourrons toujours clamer haut et fort comme le fait le ténor Philippe MEIRIEU (lui qui veut remplacer le maître transmetteur par un maître entraîneur !) , que la population scolarisée a bien changé , qu’il faut enseigner autrement . Quand on se fixe pour objectif 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat , objectif de Jack LANG alors ministre de l’Education Nationale , objectif toujours en vogue , les enseignants ne peuvent pas faire abstraction de cette évolution .
N’oublie t-on pas trop souvent qu’ils sont tous les jours sur le terrain, devant parfois « affronter » des classes dont quelques éléments perturbateurs suffisent pour qu’il soit difficile d’y enseigner dans de bonnes conditions. Ceux qui nous dirigent et déversent leur verbiage semblent l’ignorer.
Sophie COIGNARD écrit : <<Si l’école tient encore debout, c’est grâce à ses missionnaires et ses résistants – enseignants mais aussi hauts fonctionnaires parfois : au gré des réformes qui s’annulent et se contredisent, ils tiennent le cap de leurs convictions , de leur vocation . Mais combien de temps un système peut-il parier sur la seule abnégation ? Aussi longtemps que le cynisme régnera en maître au sommet de l’Etat >>
N’y a t-il pas lieu de s’inquiéter de la forte baisse ,actuellement, des candidats aux concours d’enseignement ? Il y a bien une raison !
L’Ecole va mal ? Gérard LONGUET , ministre de la République semble croire que les professeurs en portent la responsabilité . Triste conception de l’enseignement , lorsqu’il affirme qu’à l’école , ce ne sont pas les moyens, mais les chefs qui manquent ! Il faut d’après lui des patrons pour mater ou « exfiltrer » les méchants profs !!
Ce n’est pas la notation par compétences qui va permettre de sortir de cette impasse dans laquelle nous sommes . Le clergé pédagogiste est bien à l’œuvre . Je soumets cette grille de compétences (cliquer ici )en sciences physiques au lecteur qui pourra en apprécier la complexité . C’est à la mode !!
Un ami m’écrivait dernièrement évoquant une enseignante en anglais : << …..a joué le jeu des directives sur un paquet de copies: note normale PLUS évaluation par compétence (on coche les compétences acquises sur un feuillet séparé, pour chaque élève, pour chaque copie): 6 heures pour une classe de 3e de 27 élèves, je crois. C’est aussi absurde que délirant >>
Un sursaut républicain est nécessaire , mais prenons garde que l’Education Nationale ne devienne pas un Titanic .Dans son livre « Autopsie du Mammouth » , éditeur Jean-Claude Gawsewich , Claire Mazeron , secrétaire à la pédagogie au SNALC conclut : <<C’est donc bien de traitements pensés à l’échelle collective et de remèdes de fond qu’il (le « mammouth » Education Nationale ) doit bénéficier. Des solutions qui ne peuvent venir que de véritables républicains, gens de gauche ou de droite soucieux du bien et de l’avenir communs , progressistes sans démagogie, exigeants sans soumission à la loi de la Jungle. Capables de mettre en place un « plan Marshall de l’Ecole », qui profiterait enfin à tous, parce que le crime permanent perpétré contre notre système scolaire relève au final du suicide collectif >> .